Né au sud de la Bohême en 1962, émigré en France, déçu par l’évolution de l’ex-Tchécoslovaquie, Pavel Hak a assimilé le français au point d’en faire sa langue d’écriture. Il a commencé à publier deux romans et une pièce de théâtre chez Tristram, un éditeur marginal, avant de sortir Trans en 2006 dans la collection Fiction & Cie du Seuil. Un livre véhément, sans doute son meilleur roman, une sorte de conte moderne sur les tribulations d’un dissident d’aujourd’hui, échappé d’un pays asiatique indéfini, devenu une vaste morgue gelée.
On retrouve cette thématique de la déshumanisation et de la lutte contre un système asphyxiant dans le nouvel opus de l’auteur, Vomito negro. L’action démarre sous les tropiques, dans les Caraïbes. Un frère et sa sœur y sont des descendants d’esclaves. Un jour Marie-Jo disparaît, kidnappée. Et son frère, la police et la mafia aux trousses, va tout tenter pour la retrouver. D’où une course-poursuite truffée de pièges avec, en toile de fond, crime organisé, trafics en tout genre, prostitution et villas de luxe de richards vaniteux. À travers les destins chaotiques du frère et de la sœur transparaît aussi en guise de rappel historique celui de leur père, transbahuté à travers l’océan à fond de cale pour devenir esclave dans une plantation.
L’écriture de Pavel Hak est rapide et nerveuse, ce qui donne au récit son allure de course folle, hallucinée. Mais les fulgurances de Trans étaient plus fortes encore, preuve qu’il est difficile de rééditer dans le même registre une autre œuvre d’envergure. Reste que la voix de Pavel Hak a du coffre et promet d’électriser encore d’autres récits, branchés ou non sur la face noire d’un monde dominé par l’argent, « la prédation sans limites », la marchandisation des corps et la volonté de survivre coûte que coûte qui est celle des nouveaux damnés de la terre.