Comme dans ses romans précédents, Pavel Hak procède à une anatomie de la violence qui sature notre monde contemporain sous des visages divers, dans les pays en guerre aussi bien que dans nos démocraties. Mais cette fois, son propos politique s'incarne avec force dans la forme théâtrale. À l'ouverture, une « fille » clame son droit à la vie et son refus d'un pays dévasté par la guerre. À la fin, elle voit dans son agonie même une preuve encore qu'elle vit. Entre ces deux séquences, du « Songe de l'été » à « La clé des songes », le parcours du personnage se confond avec une Lutte à mort contre la violence et l'horreur qui ne cessent de se dresser sur son chemin de fuyarde puis d'immigrée clandestine… Cette « fille » ne sera jamais nommée, pas plus que les autres personnages, pas plus que les lieux qu'elle traverse : tout en gardant leur caractère concret - parfois insoutenable, les situations et la trajectoire du personnage acquièrent une dimension archétypale. Le théâtre, tel que le pratique ici Pavel Hak, permet ce réalisme à la fois brut et stylisé. La mise en scène de la parole est comme la mise à nu de ces processus de domination, de l'exercice de la violence sur l'individu. Le dialogue se fait ainsi le lieu même de la Lutte à mort, alors que le monologue préserve l'espace d'une liberté intérieure. L'auteur redonne ici à l'écriture théâtrale sa puissance dramatique et littéraire, en particulier grâce à un travail poétique sur les rythmes et les sonorités. Avec des accents qui rappellent à la fois le lyrisme de Claudel et le réalisme politique de Brecht, ce texte sonne terriblement juste.