Pavel Hak, dans Warax, brosse à gros traits quelques portraits en pied du malheur contemporain, dans un roman à entrées multiples qui défie les lois du genre.
Dans Warax, Pavel Hak (né dans le sud de la Bohême en 1962), déjà auteur de quatre romans, plonge le lecteur au sein des conflits nombreux qui font trembler le monde actuel. Il y a donc là, au coeur de ce dernier livre, un retour au sujet, au réel et au récit. Cependant, ce roman, à entrées multiples, défie les lois du genre, par sa forme et son contenu puisqu'il tisse en parallèle quatre histoires assez sombres et plutôt désenchantées. La particularité étant qu'à chaque chapitre -souvent bref -on change de direction, si bien que la progression du récit a lieu sur quatre plans différents. Il y a d'abord le mégalomane et cynique Ed Ted Warax, patron d'une industrie d'armements sise au cœur d'une presqu'île aux États-Unis. Il prône la guerre de tous contre tous, et surtout celle des riches contre les pauvres comme le moyen le plus pratique de dominer la planète. Le second récit s'ouvre sur un groupe d'hommes affublés du surnom de « meute » qui, à plat ventre dans le désert, tentent de passer clandestinement la frontière qui sépare le Mexique des Etats-Unis. Ils parviendront à survivre à la traque policière, puis à s'adapter à la vie dans une agglomération urbaine aux dimensions surhumaines. C'est ensuite l'aventure de Preston, jeune arriviste obsédé sexuel, en mauvaise posture professionnelle, qui cherche à se faire une place au soleil dans le milieu politico-médiatique. Ce jeune loup évolue au sein d'une ville gagnée parla panique d'une épidémie extrêmement contagieuse. Enfin, l'auteur nous parle de FD 21, humanoïde non identifié, rescapé d'une explosion nucléaire, qui survit au jour le jour, au milieu de vapeurs toxiques. Ce sont là les quatre trames d'un roman sans fil conducteur apparent. Pavel Hak est parvenu à faire résonner en chambre d'échos des récits qui, à première vue, n'ont rien de commun. Le lien entre tous est sans doute le nombre considérable de matériaux de couleurs sombres empruntés au réel. La lecture de Warax s'avère donc déroutante et parfois irritante. En vrai dynamiteur du récit linéaire, Pavel Hak court-circuite les habitudes de lecture, quitte à déstabiliser celui qui l'approche. Cette juxtaposition des formes ne correspond-elle pas parfaitement à notre époque où de partout nous parviennent des messages instantanés dans la plus grande anarchie de sens? Cet auteur sait à la fois manier une vision à large spectre et une autre à ras de terre. À propos, on n’est pas comblé par les passages de sexe obligés.